Film Français – 16 Octobre 2023

L’Amapa innove pour la médiation

Protagoniste déterminant dans la filière, l’Association de médiation et d’arbitrage des professionnels de l’audiovisuel (Amapa) consolide son rôle à travers le lancement d’un nouvel outil de gestion des médiations.

Créée en  2002, l’Amapa est une association assez singulière dans le paysage de l’audiovisuel. Elle est née d’une volonté commune de la Guilde française des scénaristes et de l’USPA afin de régler les différends entre les auteurs et les producteurs par la voie de la médiation. Très rapidement, le SPI, la SACD, la Procirep et la Scam ont rejoint le mouvement. Aujourd’hui, avec l’arrivée de l’ANGOA en juin dernier, l’Amapa regroupe 16  organisations professionnelles et bénéficie du soutien du CNC.

« L’Amapa a d’abord été mise en place pour soutenir les auteurs dans les conflits les opposant aux  producteurs. Les auteurs ne prenaient pas d’avocats et n’avaient pas de recours », indique Anne Landois, présidente de l’association. Très vite, la clause Amapa permettant de saisir l’association a été intégrée dans la plupart des contrats d’auteurs. Un travail de pédagogie important a été mené auprès des agents et des organisations professionnelles pour que cette clause figure dans tous les contrats de manière à rendre automatique la saisie de l’Amapa en cas de conflit. Au fur et à mesure, cette démarche a rendu plus visible la médiation et a facilité cette voie de recours. L’Amapa a également élargi son champ d’action en ouvrant ses médiations aux conflits entre sociétés de production, notamment lors de rétrocession de projets, et de distribution. L’association gère également des médiations entre auteurs lorsqu’il s’agit de conflits qui surviennent avant la fabrication de l’œuvre, mais aussi en cas d’éviction d’auteurs et de reprise d’un texte par d’autres auteurs.

« Aujourd’hui, nous sommes ravis de constater que la médiation est presque devenue un réflexe dans le métier », se réjouit Anne Landois. Chaque année, l’Amapa traite environ 25 médiations. La quasi-totalité (98%) de ces médiations se résolvent par un accord. Ce chiffre de dossiers traités sous-estime le travail de l’association. Il ne comprend pas, en effet, un nombre conséquent de médiations qui se résolvent entre les deux parties dès le stade de la préparation du dossier. « Avec la médiation, les deux parties appréhendent mieux le point de vue de l’autre. Ce rapprochement est la base de notre métier », témoigne Blanche Guichou, vice-présidente de l’Amapa. « L’association est devenue un lieu de conseil pour les différents acteurs, par le biais notamment de notre déléguée générale Charlotte Paillieux. Nous permettons un rapprochement entre les parties concernées », complète Anne Landois.

L’Amapa se définit comme « une voie de recours à la fois rapide, efficace et économique ». « Nos médiateurs sont saisis au maximum dans les deux mois après la demande de médiation. La saisie coûte 150 € par partie, destinés aux défraiements des médiateurs », détaille Anne Landois. Tous les médiateurs sont des professionnels aguerris en activité (producteurs, distributeurs et auteurs). Ils ont tous bénéficié d’une formation aux techniques de la médiation dispensée par le formateur Alain Pekar Lempereur, spécialiste reconnu en matière de gestion des conflits.

Si le volume de médiations reste très élevé pour le documentaire, genre très diversifié dans sa forme, ses budgets et ses configurations de fabrication, l’Amapa note des demandes en forte croissance pour les émissions de flux, ainsi que pour le cinéma et la fiction TV. Parmi les points de tension évoqués figurent les mentions au générique, les auteurs débarqués « de façon sauvage », les unitaires devenant des séries et la définition du créateur que cette transformation implique. L’Amapa relève également des conflits au moment du montage. « Des réalisatrices ou des réalisateurs s’opposent au producteur sur la vision du film auprès du diffuseur. Ces conflits se résolvent souvent devant l’Amapa. Nous offrons un cadre de dialogue qui ne peut plus avoir lieu ailleurs », explique Anne Landois.

 

Une plateforme pour fluidifier la saisie

Au regard de la demande exponentielle de cas dont le traitement peut s’avérer très chronophage, l’Amapa a souhaité se moderniser. L’association a mis en place un outil en ligne de gestion des médiations qui a pour but de fluidifier le processus de saisie de l’Amapa et le traitement des dossiers. Cette plateforme a bénéficié d’une configuration sur-mesure par la société Justicity. « La facilité d’utilisation permet aux parties de déposer rapidement leur demande de médiation et tous les éléments constitutifs du dossier. Cela prend moins de dix minutes », indique Anne Landois. « Il s’agit presque d’un outil de service public pour nos métiers », relève Blanche Guichou.

Ce lancement intervient en parallèle d’une année historique en matière d’accords interprofessionnels entre auteurs et producteurs concernant la fiction, le documentaire et l’animation. Tous renvoient à l’Amapa en cas de litige. « Ces accords impliquent un volume de demandes de médiation en augmentation. Notre plateforme va nous permettre d’absorber ce nouveau flux de demandes. L’Amapa devient presque un outil de régulation des conflits dans le métier », souligne Anne Landois.

Cette dernière, scénariste et présidente de l’Amapa depuis 11 ans, passera la main à la vice-présidente et productrice Blanche Guichou lors de la prochaine assemblée générale. Un passage de témoin qui illustre bien une coopération réussie entre auteurs et producteurs au sein de l’Amapa.